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Au commencement étaient le sourire, la séduction, le désir d'amour. Au commencement était la volonté de recevoir de l'autre, d'être comblé par l'autre. Au commencement était le désir d'oser faire un pas vers l'autre.
Les arguments invoqués pour expliquer le désir de mariage sont toujours très variés. Ils traduisent la nature souvent complexe de toute relation amoureuse. Exprimer clairement les raisons d'une demande en mariage est un exercice difficile. Les termes évoqués sont souvent: - la décision de fonder une famille et donc d'avoir des enfants, - le désir d'officialiser vis-à-vis de la société son union, - la volonté de construire ensemble un nouveau chemin basé sur une confiance plus totale. - le sentiment d'une continuité et surtout l'impression d'être faits l'un pour l'autre, avoir une impression de "complémentarité" (1). Il est important alors de préciser les fondements de tout désir d'engagement. L'enjeu, c'est de définir le mot "amour", de définir les forces qui nous unissent l'un à l'autre et pour lesquelles un discernement semble nécessaire. L'une des clés d'analyse de cette approche peut être résumée dans les trois niveaux de l'amour retenu par saint Augustin. - Aimer être aimé (Amare Amari) Dans toute histoire, la première rencontre contient nécessairement une composante narcissique, valorisante, I'impression d'être reconnu et apprécié dans son humanité totale. Elle rassemble à la fois l'appréciation de l'autre sur l'image de son propre corps, transformé par le désir de séduire, mais également les multiples facettes du visage (2), avec ses différents degrés d'intériorité. - Aimer Aimer (Amare Amare) Dans le même temps coexistent le bonheur donné à l'autre, le rêve d'une complémentarité possible, mais aussi un début d'échange et une humanité plus grande. - Aimer (Amare) Le niveau le plus difficile à percevoir et à vivre, c'est l'amour-charité, I'Agapè, le vrai amour. Il peut être introduit par la joie du don, de la gratuité, mais également la joie du recevoir. Amour-Agapè l'Amour "qui ne cherche pas son intérêt" (3) Cet amour-agapé est présent dans chacun de nous et réveiller cette intériorité est essentiel. Elle introduit d'autres notions plus délicates, la découverte des différences, l'asymétrie entre les désirs de chacun, la découverte d'un chemin de pardon. Il nous faut aller
au cĻur de nos désirs, dépasser l'inaccessible
complémentarité, comprendre l'importance d'un dialogue
vrai et total, découvrir les voies de l'humilité,
être attentif au désir intérieur de l'autre,
apprendre à faire le premier pas (4), alors que nous attendons
si souvent plus que nous ne voulons donner. Alors
l'amour-agapè prend tout son sens: "Un amour plus
fort que la mort" (5). Dans les
moments difficiles, malgré les faiblesses et le
désespoir, voire la violence de l'autre, avoir la
foi, l'espérance d'un amour qui croit en
l'humanité de l'autre. Un amour qui espère
qu'au fond de lui-même (6) l'autre est capable de se
ré-veiller, de retrouver le chemin de l'humble
désir d'aimer et d'être aimé.
C'est la
patience des petits pas, de la joue gauche tendue (7) mais
que précède notre regard aimant, le regard qui
espère. Au-delà du désir premier
transparaît alors le temps de l'attente, de la
patience, voire de la chasteté, loin d'un bonheur
éphémère, dans la grâce de la
dépossession de soi-même. Tendre à aller
"au-delà de (son) être pour l'autre" (8),
à une distance infinie de son Moi, se vider
soi-même (kénose) (9) pour accueillir l'autre
dans son humanité.
Alors Dieu
se révèle tout naturellement au plus profond
de nous. Car
là, plus encore, c'est Dieu présent, premier,
celui qui a tout donné d'abord et qui attend ensuite,
au fond de nous-mêmes, dans l'espérance d'un
retour. Dieu image et chemin de l'éternelle
gratuité. Le Christ qui le premier s'est
livré, exposé et mis à nu dans le
décentrement total de lui-même, scellant ainsi
la Nouvelle Alliance. Nous
sommes alors appelés à découvrir
l'existence de cet Autre qui pré-existe à
notre désir et de qui nous recevons l'amour. Alors,
dépassant l'approche "humaniste", l'amour conjugal
s'inscrit dans une autre dimension, plus vaste encore, celle
du mariage-sacrement. Celle d'un Dieu présent qui
purifie notre regard et rend ouvert au travail de l'Esprit,
de la Charité et de l'Espérance.
Nous
pouvons alors prendre conscience que l'alliance humaine
s'inscrit dans une alliance plus grande, qu'elle est signe
de l'éternel Amour, de l'Alliance scellée
à jamais entre le Christ et son Eglise (10).
(1) Voir la très bonne analyse de X. Lacroix qui montre l'insuffisance de cet idéal dans Les Mirages de /'Amour, Bayard Centurion 10/97, p. 25 et ss. (2) Cf également de X. Lacroix, Le corps et l'Esprit, Vie Chrétienne. (3)1 Corinthiens 13, 5 (texte où l'apôtre utilise le terme grec assez rare d'Agapé). (4) Cf Lévinas: Autrement qu'être ou au-delà de l'essernce, Poche, p. 134. (5) Cantique des Cantiques, 8. (6) "L'agenouillement devant le sanctuaire éternel que l'Autre est appelé à devenir", à propos du lavement des pieds, M. Zundel (Vie, Mort et Résurrection, Anne Sigier 2/97 p. 84). (7) Luc 6, 29. (8) Lévinas, ibid. (9) Terme grec utilisé dans Philippiens 2, 7.(10) Ephésiens 5, 25.
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