Personne ne choisit
le début d'une histoire amoureuse sur la base d'une
étude objective... Le sentiment domine. Or le sentiment est
par essence quelque chose qui nous échappe...
Et certains,
après un temps d'envol s'interrogent : suis-je libre dans
cette union ?.
Une des
premières crises de la vie à deux porte souvent sur la
liberté. La liberté de rester célibataire, la
liberté de regarder ailleurs, la liberté de faire ce
qui me plaît, la liberté d'être ou de ne pas
être à tes cotés...
D'ailleurs,
qu'est-ce que la liberté ?
La liberté, un chemin à trouver
Elle
est un mélange constitué de plusieurs niveaux,
distincts de fait mais souvent masqués par son désir
:
La
première liberté est souvent d'affirmer et de
nier. Dans le couple, c'est la liberté instinctive de
dire oui ou de dire non, exprimer son refus face à un
projet commun vécu comme une contrainte.
Ensuite
vient le libre arbitre
(Choisir d'aller chez nos amis ou avec ta famille).
Elle engage la réflexion. Le choix selon des
critères (tu dis que, je pense que...).
La
liberté en acte est plus délicate. Plus que
celle de choisir (le non choix perpétuel ne
débouche sur rien et comme l'exprime la pièce
de Don Juan, conduit à la
mort) elle
engage ma volonté. Dans le couple, il s'agit de faire
un effort de volonté. Je décide et je
fais...
La
liberté confrontée, limitée par le
réel, par les autres est un troisième niveau.
C'est une liberté mais dans laquelle les contraintes
internes (désir, idéal,
complémentarité) et externes (pression
familiale, amicales, professionnelles) constituent un frein
à l'exercice de ma volonté. J'ai envie de.. mais
toi tu as envie de ou tu refuses...
Certes au
départ, on "a le sentiment" d'être libre, parce que
poussé par le désir, nous sommes aspirés vers ce
qui nous semble un plus grand lieu de liberté. Cette apparente
liberté nous apporte le bonheur, elle est donc
libérante par rapport à notre vie de célibataire
et nous avons le sentiment que cette voie est une voie de
liberté.
Mais l'aveuglement
de nos premiers désirs nous masque la réalité
pleine de l'autre et la notre. Les différences, les
divergences profondes n'apparaissent pas toujours au départ.
La séduction joue un rôle majeur dans l'élan
premier...
Pour gagner ton
coeur je me fais douceur, tendresse et attention. Je t'offre des
fleurs, je cours à tes rendez-vous, je vole dans tes
bras...
Le jeu de la
séduction n'est pas un exercice où l'on dispose
toujours de sa propre volonté.
De plus, nous
sommes parfois aveuglés voire esclaves de notre idéal
(sur l'autre et sur nous-mêmes) ... « Je me suis rendu
compte que je l'aimais le jour où j'ai été
déçu par elle. C'est passé de l'amour idyllique
à l'amour de l'autre, dans l'intégrité de sa
personne, avec ses qualités, ses défauts...
»
C'est pourquoi
parfois il est préférable de prendre le temps.
Prendre le temps de
la parole, de l'échange,
Prendre conscience
des différences, des libertés de chacun,
Prendre le temps de la tendresse, de la rencontre coeur à coeur avant
la rencontre corps à corps.
Se marier, pourquoi ?
Lorsque
cette histoire conduit au mariage, les décisions profondes de
ce mariage sont multiples et constituent un mélange complexe,
où, là encore, notre liberté peut être
entrevue :
Le désir de fonder une
famille
C'est
une des joies de l'union. De plus elle dépasse notre duo pour
ouvrir à une plus grande altérité. En ce sens,
la fécondité est la fleur de notre amour, le
couronnement de notre couple et la récompense d'une union dans
la joie.
Mais en
caricaturant un peu, on peut noter cependant que la femme est souvent
plus touchée par ce désir, du fait de sa psychologie
intérieure plus marquée par le désir d'enfanter.
Chez l'homme ce désir est également présent,
mais sur un axe plus existentiel, parce que sa
fécondité donne un sens à son existence... C'est
pourquoi l'absence d'enfant sera toujours une souffrance vécue
très différemment mais qui peut-être
déchirante pour le couple...
Le désir de montrer au
monde son histoire
Lorsque
notre amour est joie, nous avons envie de passer du privé au
public. De montrer à notre famille, à nos amis que
cette union est bonheur...
Le passage du
privé au public est un stade dans la maturité du
couple.
Il traduit en effet
une ouverture au delà de la fusion auquel on tend au
départ. Passer de l'île déserte (avec amour et
eau fraîche) à la vie en société, joie
d'une rencontre avec des tiers (échanges et
complémentarités, apport du tiers dans la vie du
couple...), risquer le regard des autres sur l'autre, regard de
l'autre sur les autres.
Le désir de prouver son
amour
C'est
le point le plus délicat : il mène à un
engagement et il se prouve chaque jour.
a) l'amour humain
conduit à un engagement mutuel, qui est maturation et
objectivation du désir d'aimer - ce qu'exprime le rite du
mariage.
Si,
à ce moment-là, les motivations sont floues, il est
souhaitable de surseoir l'engagement et de se donner un temps
supplémentaire pour ré-examiner les raisons
essentielles du choix l'un de l'autre et de s'interroger sur la
pertinence d'une telle union.
S'engager avec des
motivations qui flottent, c'est la porte ouverte au
malheur...
b) l'amour se
prouve au quotidien.
Parfois, pour
montrer à l'autre son attachement, sa fidélité,
on s'imagine que passer la bague au doigt servira de preuve.
L'alliance n'est pas une preuve d'amour. La preuve de l'amour est
dans le dire d'amour au quotidien. Il est donc nécessaire de
se dire son amour chaque jour ; sinon il n'y a pas amour, en
dépit des promesses du passé.
Un courrier
récent illustre ce questionnement intérieur
:
Je
désire m'engager avec une amie sur le chemin du mariage. Mais
cela m'angoisse terriblement C'est quasiment une peur panique. La
réaction est sans doute excessive. Néanmoins, suite
à votre expérience dans le suivi des couples,
pouvez-vous m'indiquer si c'est courant? Est-ce rédhibitoire?
ceux qui ressentent les mêmes angoisses arrivent-ils finalement
à se vaincre?
La volonté d'aller plus
loin, de construire à deux.
Aller
plus loin, donner à l'autre plus que l'on ne l'a jamais fait.
Faire de son attachement pour l'autre un tremplin au delà de
notre simple "Moi", un décentrement...
Cette tendance plus intériorisée
correspondrait plus à un véritable amour.
C'est une tension qui ouvre notre coeur, qui n'est plus narcissique ou
égocentrique mais qui appelle notre responsabilité
et notre volonté. Il s'agit d'une liberté plus véritable
où le désir d'aimer et d'être aimé est offert
à l'autre dans l'union des coeurs : je t'aime pour toi-même.
Si l'on en arrive là, alors le mariage prend sens....